Quand une experte en patrimoine artistique décode Art Basel 2025
- alionacoslet
- il y a 6 jours
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Il y a un mois et demi, Art Basel a réuni le marché mondial de l’art autour d’œuvres emblématiques et de transactions spectaculaires. Même avec le recul, cette édition continue de résonner par les tendances qu’elle a révélées et les opportunités qu’elle offre encore aujourd’hui aux collectionneurs avertis.
Mardi First Choice, 11h-16h. Dès le petit-déjeuner Ruinart de 9h30, j’ai senti que cette édition serait différente. Moins de course effrénée, plus de vraies conversations. Et paradoxalement, les ventes ont surpris tout le monde.
Ce qui m’a marquée : David Hockney explose les compteurs avec Mid November Tunnel (2006) vendu entre 13-17 M$. Chez Zwirner, cette sculpture de Ruth Asawa est partie à 9,5 M$ et un Gerhard Richter à 6,8 M$. En période troublée, on se rabat sur les valeurs sûres du XXe siècle.
Mon agacement du jour : Picasso par ci, Picasso par là. Tous les visiteurs notaient cette surabondance d’œuvres du peintre espagnol au rez-de-chaussée, sur de nombreux stands, de Pace à Hauser & Wirth. Au bout d’un moment, cette omniprésence devient lassante. Le marché manque-t-il à ce point d’imagination ?
Mon petit regret : cette sublime pièce de Moulène 2024 à 90 K€ chez Miguel Abreu. Je la recommande chaudement, mais aucun de mes clients ne souhaite l’acquérir pour l’instant. Elle reste en négociation depuis mardi – on verra lundi si elle trouve preneur ailleurs.
Mon coup de cœur absolu : les 21 portes de Jaume Plensa à Unlimited (ouverture lundi soir). Forgotten Dreams porte chaque article de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Face à ces seuils lumineux, impossible de rester indifférent. L’art qui fait sens, exactement ce que recherchent les collectionneurs d’aujourd’hui.
Ce qui bouge : Basel Social Club garde son énergie particulière dans ce paysage. Depuis que j’ai créé Show Off en 2006 (première alternative à la FIAC), je sais reconnaître ces espaces qui gardent un regard frais. Ici, l’art respire autrement, loin de la surabondance de Picasso des stands principaux.
Ma lecture du marché : Georg Baselitz fait un carton (1,8 M$ et 1,2 M$ chez Ropac), les Asiatiques reviennent, et comme le dit si bien Hervé Mikaeloff : « C’est le moment d’acheter ! » Les prix redeviennent raisonnables.
Enseignement pour les collectionneurs privés : cette édition a confirmé deux tendances clés pour vos stratégies patrimoniales. D’abord, le retour aux valeurs établies du XXe siècle comme refuge en période d’incertitude : Hockney, Richter ou Asawa restent des placements solides, à condition de privilégier les pièces iconiques. Ensuite, la réouverture d’une fenêtre d’opportunités sur des artistes contemporains significatifs mais encore sous-valorisés, comme Moulène ou Plensa, qui allient puissance esthétique et potentiel de revalorisation. La clé : ne pas céder aux modes éphémères, mais anticiper les œuvres qui dialogueront demain avec les grands noms dans les musées.
L’art retrouve sa respiration. Vivement qu’on dépasse cette époque “Picasso partout”.
Merci Vanessa Quang - Julien pour cet article.
Vanessa Quang-Julien, galeriste parisienne et fondatrice de la Galerie Vanessa Quang, est reconnue pour son engagement dans la promotion d’artistes contemporains et sa maîtrise des dynamiques du marché de l’art. Depuis plus de 20 ans, elle accompagne ses collectionneurs dans la constitution, la mise en valeur et la transmission de leur patrimoine artistique, notamment à travers la vente, l’exposition et le prêt d’œuvres à des institutions prestigieuses.